Le suicide avec un sac n’est pas une méthode assurée
Le suicide avec un sac consiste à tenter de s’asphyxier jusqu’à ce que mort s’ensuive, parfois à l’aide d’une intoxication volontaire.
Cependant, l’instinct de survie biologique semble trop fort la plupart du temps et la plupart des tentatives se terminent par un réveil pénible, des conséquences physiques plus ou moins sérieuses et permanentes, et souvent une hospitalisation.
Aucune méthode de suicide n’est assurée. C’est pourquoi il vaut mieux se protéger contre les risques de la crise suicidaire, ou demander de l’aide.
Complications possibles de tentatives de suicides par sac
Parmi les séquelles physiques possibles, on parle entre de coma possible et de séquelles neurologiques temporaires ou permanentes liées au manque d’oxygène ou à l’intoxication.
Un handicap s’avère possible, de même qu’un état neurovégétatif.
Presque toutes les tentatives de suicide amènent des complications diverses, y compris, souvent, des passages à l’hôpital. Selon le diagnostic posé à l’hôpital, un séjour plus ou moins long en psychiatrie peut alors survenir, avec soutien plus ou moins bénéfique ou médiocre. On entend des histoires de suicidaires qui sortent de l’hôpital plus désemparés qu’à leur arrivée. Souvent, la tentative de suicide se révèle une méthode peu efficace pour obtenir de l’aide professionnelle de qualité.
Si la tentative de suicide veut servir de message, celui-ci arrivera dans un contexte chaotique, il sera interprété dans une atmosphère de panique chez les proches, sans parler du risque d’être vu comme un acte de folie insensé, passagère ou non.
Se préparer à se suicider avec un sac… et survivre
Comment se suicider avec un sac avec 100% de chances de mourir? Comment le faire sans souffrir – et sans faire souffrir? On constate que les tentatives de suicide par sac amènent surtout des risques de souffrance et de séquelles.
J’ai vu des personnes dans le coma intubées de partout à l’hôpital. J’été témoin des effets d’un manque d’air prolongé au cerveau. J’ai vu les effets dévastateurs sur les reins ou d’autres organes internes[…] J’ai même entendu des personnes regretter terriblement leur geste, mais mourir plus tard à la suite de complications médicales liées à leur tentative.(Marc-André Dufour, Se donner le droit d’être malheureux )
Toutes méthodes confondues, pour chaque tentative de suicide menant à la mort, on compte en général de 25 à 30 tentatives et 5 hospitalisations pour blessures auto-infligées[1].
Préparer une tentative de suicide devrait donc impliquer la préparation de la survie. Que se passera-t-il après? Il est fort probable, presque certain, que l’envie de vivre reviendra aussitôt (voire pendant) la tentative.
Plus de 90% de ceux qui font une tentative ne se suicident finalement pas; la souffrance finit par passer. Peut-on penser alors à survivre… sans passer par cette tentative?
«Je n’ai pas « raté » mon suicide. J’ai réussi à survivre, puis à revivre. »
Normand , rescapé
Se suicider par un sac et mourir
L’agonie peut être relativement longue.
Comme dans toute mort, le corps pourra se vider de ses déjections, les yeux pourront rester ouverts, le visage grimaçant, et autres horreurs.
Selon la loi, tout suicide entre dans la catégorie des «morts violentes». Il y a alors dossier et enquête de police, approfondie ou succincte. Un coroner doit aussi obligatoirement enquêter sur chaque suicide puis produire un rapport, qui sera public. Des prélèvements sur le corps sont faits, parfois une autopsie, des proches sont interrogés, ainsi que des professionnels comme le médecin traitant, le psychologue, etc.
«Le lendemain de sa mort, juste après avoir parlé au coroner, j’ai reçu un appel de l’Institut Douglas, qui fait des recherches très réputées sur le suicide. Ils voulaient en savoir davantage sur le suicide de ma soeur. J’ai répondu à un grand questionnaire, puis je les ai autorisés à faire un prélèvement de son cerveau. Je crois qu’ils ont carrément enlevé son cerveau pour en faire des lamelles. J’aurais autorisé n’importe quoi pour aider à la recherche sur le suicide afin qu’on puisse comprendre l’incompréhensible et prévenir peut-être des suicides futurs. C’est trop atroce pour ceux qui restent, pour ceux qui aimaient et aiment encore.»
Alice, soeur d’une suicidée
Conséquences sur les survivants
J’ai d’abord vu un sac posé sur le lit, puis j’ai vu la forme sous le draps. Dans un moment d’horreur indescriptible, j’ai compris que sa tête était dans le sac. Au téléphone, la préposée du service d’urgence m’a demandé de lui faire le bouche-à-bouche, mais ma femme était si raide que la bouche ne s’ouvrait plus.
Elle était morte et pour moi, un long calvaire commençait.
Jean-René, survivant
Tout le monde m’avait déçue. Je leur en voulait tellement, à tous!
Et je dois avouer qu’il y avait une part de vengeance dans mon désir de suicide: «vous allez payer». Je voulais qu’ils souffrent comme moi je souffrais.
Andrée
Selon les méthodes de suicide, ce sont les proches qui retrouvent le cadavre en moyenne une fois sur deux. Le traumatisme de ces personnes n’est pas difficile à imaginer. Notons qu’entre 7 et 10 personnes sont affectées profondément pour chaque suicide.[3]. Certaines de ces personnes ne s’en remettent jamais, une portion se suicident à leur tour, beaucoup auront terriblement honte, toutes se sentiront coupables. Personne ne comprendra.
L’arrêt de la souffrance mentale est couramment cité comme la principale motivation du suicide, mais la triste réalité est que le suicide n’arrête pas la douleur mentale: le suicide ne fait que transférer la souffrance à ceux qui restent.
Kees Van Heeringen[4]
«Comment se suicider avec un sac pour ne plus rien ressentir»
«J’espérais m’endormir et ne jamais me réveiller, tout simplement. Mais j’ai ouvert les yeux douze heures plus tard, amochée, déboussolée, avec la nausée et un mal de tête qui a duré deux jours. Je ne l’ai dit à personne. Ça fait huit ans, déjà, et je ne comprends toujours pas ce qui s’est passé dans ma tête, dans mon coeur. »
Marie-Andrée, ancienne suicidaire
Selon la «théorie de la fuite», les gens n’auraient pas envie de se suicider s’ils pouvaient:
- être quelqu’un d’autre
- être ailleurs, ou
- ne plus être tourmentés
«Quand je pense au suicide, je souhaite devenir n’importe qui, n’importe quoi sauf moi-même. »
Jesse Bering [5]
Alternatives
On peut rêver de se suicider avec un sac, puis sombrer dans un repos sans fin, mais la réalité est généralement tout autre….
Existe-t-il un moyen plus sûr et sans douleur?
«Si j’étais née avec un bouton d’autodestruction […], je pense que je n’existerais plus depuis longtemps. […] Mais j’ai l’impression que je ne suis pas la seule, et je suis même sûre que si tous les humains disposaient d’un tel bouton d’autodestruction sur lequel appuyer, il n’y aurait plus grand monde ici-bas»
Témoignage cité par Cristophe André[6]
Puisque le bouton d’autodestruction instantané n’existe pas, peut-on soulager le mal autrement? Si on avait les deux options suivantes:
- Mourir sans souffrir
- Vivre sans souffrir
Quelle serait l’option à privilégier?
Se suicider sans souffrir ou vivre sans douleur?
Préparer la crise suicidaire plutôt que préparer le suicide
Qu’est-ce que la crise suicidaire? Pourquoi faudrait-il se «préparer» à l’affronter.
J’ai peur de ce qui se passe en moi. Il y a un malaise incroyable. Je sens comme une boule infiniment lourde dans mon ventre. Parfois, mon envie de disparaître semble plus forte que moi, et j’ai peur de me suicider un jour malgré moi.
Daniel
La crise suicidaire a été documentée chez les morts par suicide, tout comme chez ceux qui ont survécu. Elle attaque principalement ceux qui ruminent des idées suicidaires. On pourrait la définir comme une violente tempête mentale qui survient sans prévenir, parfois juste après un événement pénible. Pendant cette crise, on a perdu toute liberté. C’est le moment où l’idée suicidaire prend toute la place et mène à la mort en l’espace de quelques heures, parfois même en quelques minutes.
Cette crise est donc extrêmement dangereuse. Il est cependant possible se protéger contre elle.
À lire:
Comment se protéger contre la crise suicidaire?
Notes
↑1 | Agence de la santé publique du Canada, Nous soulignons |
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↑2 | Stuart Hample, Doutes & Certitudes- Woody Allen en comics, Fedjaine, 2010 |
↑3 | Agence de la santé publique du Canada |
↑4 | Kees Van Heeringen, The Neuroscience os Suicidal Behavior, Cambridge Fundamentals of Neuroscience in psychology, Cambridge University Press, 2018, p.1 |
↑5 | «When suicidal, I’d happily swap places with anyone, or anything, as long as it isn’t me.». Bering, Jesse. Suicidal (p. 62). University of Chicago Press. (traduction libre). |
↑6 | Christophe André, Les états d’âme, p. 201 |